ISRAËL CHASSE LES IMMIGRÉS ILLÉGAUX

La politique d’expulsion de plusieurs centaines d’immigrés illégaux mise en oeuvre par Israël en juin 2012 n’est qu’un premier pas vers un « Grand Israël » presque exclusivement juif, dans la lignée la plus traditionnelle de l’idéal sioniste. Alors qu’en France on se mobilise contre l’expulsion de trois Afghans…

Le 17 juin 2012, cent vingt-sept immigrés illégaux sud-soudanais étaient renvoyés chez eux par avion, avec une prime au départ s’élevant à mille euros par adulte et quatre cents euros par enfant : le fruit d’une – généreuse – campagne d’expulsion mise en oeuvre en Israël. Ce vol est le premier d’une longue série à venir. Une fois par semaine, pendant environ un mois, un avion décollera de l'aéroport de Tel Aviv à destination de Juba, capitale du Soudan du Sud.
Outre les Sud-Soudanais, les autorités israéliennes entendent expulser les quelque 60.000 migrants africains qui sont entrés illégalement en Israël ces trois dernières années en passant par l'Egypte. Environ 50.000 sont originaires du Soudan et de l'Erythrée. Dans les colonnes du Haaretz daté du 10 juin 2012, les journalistes Dana Weiler-Polak et Tomer Zarchin estiment que Eli Yishai, ministre israélien de l’Intérieur, poursuivra cette politique d’expulsion jusqu’à ce qu’il n’y ait plus aucun immigré illégal en Israël.


Le gouvernement a reçu l'aval de la cour suprême israélienne pour procéder à l'expulsion de mille cinq cents Sud-Soudanais en situation irrégulière. Le gouvernement sud-soudanais approuve cette politique. Le Jerusalem Post citait d’ailleurs, le 17 juin 2012, Abdon Terkoc Matuet, du ministère des Affaires étrangères du Soudan du Sud, qui déclare « encourager [ses] concitoyens les citoyens sud-soudanais à retourner au Soudan du Sud, car nous en avons besoin pour contribuer au développement du pays ». Il ajoute que plus rien ne justifie cette émigration, la guerre au Soudan étant achevée. Cette mesure a été étendue à deux mille autres, ressortissants de Côte-d'Ivoire. Israël n’hésite pas à faire preuve de fermeté envers ses clandestins – politique qui s’inscrit dans la continuité des mesures entreprises en novembre 2010, avec la construction d’un mur dans le désert du Sinaï à la frontière égyptienne. Plus récemment, en avril 2012, la chaîne de télévision israélienne privée Chaîne 10 indiquait qu’un mur allait être construit à Metoulla, le long de la frontière libanaise.
Cette politique d’expulsion n’est pas très étonnante. D’après le sociologue Uri Davis, ce projet s’appuie notamment sur les analyses de Joseph Weitz, ancien membre important du Fonds national juif, qui considère que « l’étranger perçu comme menace est plus facile à contrôler et à surveiller quand il est hors du pays ». C’est-à-dire, en ses termes, « qu'il est plus facile de surveiller les activités d'un voisin que celles d'un locataire ». Weitz concluait sur la « nécessité de maintenir le caractère d'un État qui dorénavant sera juif (...) avec une minorité non juive limitée à 15 % ».
Le gouvernement de Benjamin Netanyahou reprend aujourd’hui cette théorie à son compte, estimant que « la grande majorité des Africains présents dans le pays sont à la recherche d'un emploi et menacent de bouleverser l'équilibre démographique de l'Etat hébreu, qui ne compte que 7,8 millions d'habitants ». Ces derniers mois, des manifestations anti-immigrés parfois violentes se sont produites en Israël, notamment à Tel Aviv, et des responsables politiques, à commencer par le ministre de l'Intérieur Eli Yishai, ont dit craindre pour le maintien de l'identité juive de l'Etat face à cet afflux de clandestins.
En effet, le projet d’un Etat d’Israël ethniquement homogène, donc exclusivement peuplé de juifs, s’inscrit pleinement dans l’identité sioniste. La revue du Shas (parti politique israélien ultraorthodoxe), Yom LeYom, vient d’ailleurs de rejoindre de manière fracassante la lutte menée contre les immigrés illégaux en s’adressant directement à eux : « Vous nous gâchez notre rêve » ! Pour le Shas, tout Israélien s’opposant à la politique de lutte contre l’immigration détruit dès lors ce pour quoi ses grands-parents se sont battus.
La politique d’inversion des flux migratoires menée fermement par Israël ne fait l’objet d’aucune remontrance internationale. Qu’attend donc la France pour faire de même ?
Frédéric Petit

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