EUROPE ET IMMIGRATION : LES PROMESSES NON TENUES

EUROPE ET IMMIGRATION : LES PROMESSES NON TENUES

par Jeanne Smits
Directrice de la rédaction du quotidien Présent.
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Le candidat Nicolas Sarkozy avait promis davantage de rigueur en matière d’immigration. La France devait passer d’une immigration “subie” à une immigration “choisie”. Bien des électeurs ont été dupes de ce tour de passe-passe. Aujourd’hui, Sarkozy, qui accueille avec bienveillance les propositions délirantes de Jacques Attali concernant l’ouverture des vannes de l’immigration, ne peut plus faire illusion : les électeurs les plus bienveillants à son égard doivent admettre qu’il n’est qu’une sorte de chambre d’enregistrement des projets, des directives, des exigences de l’Union européenne. Leur seul but : l’accroissement de l’immigration, illusoire solution à l’augmentation de la croissance.

Tous les ingrédients sont en place pour permettre d’annoncer, à brève échéance, la mise en place d’une politique d’immigration extra-européenne agressive en direction de l’Union européenne – et donc de la France. C’est déjà le pays qui attire le plus grand nombre de demandes d’asile.
Candidat, Nicolas Sarkozy avait promis davantage de rigueur : une immigration “choisie” plutôt qu’une immigration “subie”. En clair : on allait renvoyer chez eux davantage de clandestins, durcir les conditions du regroupement familial, tout en (comprenait le bon peuple) ne faisant désormais entrer en France que des étrangers qualifiés, à même d’occuper des postes dans les secteurs qui connaissent déjà la pénurie de maind’oeuvre…
Le tour de passe-passe était joli, et bien des électeurs s’y sont laissé prendre. La difficulté de renvoyer durablement des clandestins en dehors des frontières françaises, alors que les frontières terrestres sont déjà fondues dans l’espace Schengen, était soudain oubliée. Le durcissement du regroupement familial allait, on le savait, se heurter aux organismes d’aide aux étrangers : il suffit de voir le Réseau éducation sans frontières tirer profit de quelques dossiers poignants surexploités dans les médias pour voir où l’on finira par aboutir… Mais on préféra se payer de mots et afficher une certaine résignation devant l’immigration de qualité prônée par le candidat.

200.000 nouveaux immigrés
Or quels sont les secteurs en difficulté ? Le bâtiment ; la restauration ; les services – et plutôt dans les emplois à faible qualification. Mais encore – par exemple – les professions médicales, où l’on doit souligner que la pénurie a été organisée à travers le numerus clausus sévère qui limite le nombre de nouveaux professionnels formés en France pour soigner leurs compatriotes. Résultat : alors que le chômage demeure épouvantablement élevé, on va chercher ailleurs aussi bien des hommes prêts à accepter un travail pénible mais tellement mieux payé que chez eux, ou des diplômés qui dans leur propre pays risquent de faire cruellement défaut. Cette mondialisation de la main-d’oeuvre et du savoir-faire a un effet que la Commission de Bruxelles susurre, à propos de l’Irlande, dans son dernier rapport sur la réalisation de la “Stratégie de Lisbonne” : elle y constate qu’un solde migratoire positif y a permis de contenir la pression du coût de la main-d’oeuvre…
A peine installé à l’Elysée, Nicolas Sarkozy chargea le ministre de l’Immigration, Brice Hortefeux, d’une feuille de route. Sa lettre de mission, rendue publique le 9 juillet 2007, proposait de faire passer de 7 % (sur 185.000 visas délivrés en 2005) à 50 % “du flux total des entrées”, non défini, le taux de ”l’immigration économique”. Que le fait d’ouvrir les frontières françaises à des immigrés économiques aboutira nécessairement, à terme, à une augmentation proportionnelle des demandes de regroupement familial ne semble avoir traversé l’esprit d’aucun commentateur en vue…
Dans ce dossier comme dans d’autres (celui de la “flexicurité“, par exemple), le “Président de la rupture” (sic) ne fait d’ailleurs qu’appliquer ce que la Stratégie de Lisbonne, définie en 2000 pour que l’Union européenne relève le “défi de la mondialisation”, et redéfinie en 2005 parce que trop compliquée, recommandait et continue de recommander avec l’ensemble des instances de l’UE : une politique d’immigration commune, et accrue.

Le taux moyen de natalité en Europe étant évalué en 2006 à 1,47 enfant par femme, il est en effet impossible de fermer plus longtemps les yeux sur le suicide démographique européen. Et l’un des principaux outils recommandés pour y faire face, alors qu’on refuse d’envisager une politique favorable aux familles nombreuses autochtones demeure le recours aux immigrés non-Européens.
Même Sarkozy, apparent hyper-président, n’est donc qu’une sorte de chambre d’enregistrement des projets, des directives, des exigences de l’Union ; et son “sherpa” hérité de Mitterrand se situe sur exactement le même plan. Les “300 décisions” (prétendues) de Jacques Attali pour “changer la France“ comprennent celle de faire appel à 200.000 nouveaux immigrés économiques par an. L’ensemble des mesures qu’il a proposées, accueillies avec le plus grand sérieux par le Président, sont censées représenter un point de croissance en plus d’ici à 2012. Les 200.000 nouveaux immigrés à eux seuls assureraient la moitié de ce point gagné : étonnant, non ?
Bien entendu, cette pression extraordinaire pour ouvrir la France à davantage d’immigration de peuplement, tout en passant sous silence le taux de chômage des autochtones et la paupérisation croissante et concomitante des classes moyennes, obéit à des objectifs tout à fait autres.
Ou, pour dire les choses autrement, il entraîne de nouvelles priorités de la part de ce qu’il reste de pouvoirs publics en France et de celle du pouvoir public européen, de plus en plus prégnant. La “discrimination positive” [N.D.L.R. : en fait une discrimination antifrançaise] est le corollaire de l’immigration accrue ; elle a les faveurs de l’Europe et celles de Sarkozy. La dernière nouveauté des textes européens de surveillance de la non-discrimination mérite à cet égard d’être méditée : elles présentent “l’intégration comme un processus allant dans les deux sens”. On ne saurait être plus clair.

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