LES VÉRITÉS D’UN COMMISSAIRE

LES VÉRITÉS D’UN COMMISSAIRE

Par Xavier Van Lierde
journaliste au magazine Monde & Vie

Alors que ministres, médias et associations patronales demandent « un plan Marshall pour les banlieues » et assomment la France sur les causes sociales des émeutes qui ont enflammé les banlieues, il n’est pas inutile de lire le nouvel ouvrage de Charles Pellegrini, ancien chef de l’Office central de répression du banditisme. Ce pamphlet est un antidote à ces discours lénifiants.

C’est peu dire qu’au lendemain de trois semaines de guérilla urbaine, Banlieues en flamme, le livre que publie l’ex-commissaire Pellegrini, tombe à point et qu’il est promis à un beau succès de librairie. Mais qui pourrait lui en faire le reproche, alors que, voici quinze ans, il avait déjà publié un ouvrage prémonitoire : Demain la guerre civile ?

Le langage de la vérité
La guerre civile ? Mais nous y sommes. Et le moindre mérite de Charles Pellegrini n’est pas de rappeler que, depuis ce premier cri d’alarme, rien n’a été fait pour conjurer efficacement le sombre avenir qu’il prédisait à la France. L’ancien flic n’est pas un adepte de la langue de bois. Au contraire, estimant, à juste titre, que « la distorsion abyssale qui existe entre langage public et langage privé, au prétexte que toutes les vérités ne sont pas bonnes à dire aux Français » et que « le refus de désigner les problèmes » expliquent l’aggravation du mal, il tient à ceux qui voudront bien le lire le langage de la vérité à propos des maux qui enflamment les banlieues et menacent la concorde civile. Agrémenté de nombreux chiffres et statistiques qui sont autant de réquisitoires implacables contre les adeptes de la méthode Coué, l’ouvrage excelle à dissiper les écrans de fumée placés devant les yeux des Français. Les facteurs du désordre sont ici bien identifiés, à commencer par les ravages de Mai 68 et ses slogans permissifs. Ancien homme de terrain, connaisseur de la réalité des “zones de nondroit”, Charles Pellegrini ne supporte plus « les sociologues, les psychologues et autres “spécialologues” » communiant en rond dans la culture de l’excuse à l’égard des criminels et délinquants.

Nombreux chiffres et faits concrets
Les arguments avancés par ces derniers pour nous convaincre que les nouveaux barbares qui sèment la terreur à la périphérie de nos villes sont des victimes, voire de nouveaux guérilleros combattant pour une société plus juste, sont ici dénoncés et déconstruits un à un. Alors que le gouvernement nous promet un « plan Marshall pour les banlieues », et où les médias fustigent l’égoïsme des Français et l’injustice dont seraient victimes les populations immigrées habitant les quartiers sensibles, Charles Pellegrini remet les pendules à l’heure : « L’État, les collectivités territoriales et l’Union européenne ont consacré, entre 1989 et 2001, 39,5 milliards d’euros aux quartiers sensibles. En 2002, les contribuables ont versé 6,2 milliards d’euros pour le développement de la politique de la ville. Cet argent a servi à réhabiliter des immeubles, à financer la vie associative des quartiers, à faciliter l’emploi des exclus, et à tenter de faire baisser la délinquance. » Et de remarquer : « Les résultats n’ont pas été à la hauteur des ambitions, c’est le moins que l’on puisse dire ». De même, pour railler ceux qui espèrent supprimer la violence urbaine en détruisant les barres HLM, il a ce mot définitif : « Changer le contenant n’a jamais amélioré la qualité du contenu » !

Enjeux démographiques et civilisationnels
Qualité plus rare encore, Charles Pellegrini ne se berce pas d’illusions quant aux effets d’une politique - que l’on pourrait qualifier de « sarkozienne » - qui se limiterait à une plus vigoureuse répression des crimes et délits, sans prendre en compte les causes géopolitiques et civilisationnelles de la crise. Outre de longs développements sur le péril que fait courir à la France le développement sur son sol de l’islam radical, il dénonce avec justesse les effets con-jugués de l’effondrement démographique et du laxisme migratoire. Citant les projections démographiques de Jacques Dupâquier et Yves-Marie Laulan, selon lesquelles les communautés immigrées et leurs descendants pourraient représenter 24 % de la population totale en 2030, Charles Pellegrini observe : « Certains politiques veulent nous rassurer en martelant que l’immigration va sauver nos retraites et notre économie. Les milliards dépensés en diverses allocations et aides pour réaménager les banlieues seraient donc un investissement sur l’avenir. Un regard sur l’Histoire nous permet d’en douter. Les pays formant l’empire romain il y a dix-huit siècles qui n’ont jamais connu l’islam sont aujourd’hui les pays parmi les plus prospères, alors que les parties de ce même empire qui ont eu à subir ses invasions le sont beaucoup moins. » Et de plaider pour que l’Union européenne n’intègre pas demain en son sein la Turquie, et surtout pour que les peuples européens retrouvent la fierté légitime de leur histoire et de leur identité. Nul ne doute que les membres de l’intelligentsia politico-médiatique se pinceront le nez en lisant le livre de Charles Pellegrini et qu’il sera occulté ou raillé comme simpliste, réducteur, etc. Quant aux autres - dont nous sommes -, ils se reconnaîtront globalement dans le plaidoyer lucide et sincère d’un homme proclamant en conclusion : « Mon père m’a toujours expliqué que chacun avait le droit de vivre sa vie comme il l’entendait, mais il ajoutait aussi que “charbonnier doit rester maître chez soi” ! »


Banlieues en Flammes, Charles Pellegrini, Éditions Anne Carrière, novembre 2005, 181 pages, 17 euros.

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