Peu à peu, nos convictions se répandent dans la société

Peu à peu, nos convictions se répandent dans la société

 

Parfois, face à l'aveuglement de nos gouvernants, nous en venons à céder au découragement ou à la lassitude. Il est vrai que les occasions de s'indigner ne manquent pas et que souvent l'apathie de nos compatriotes nous plonge dans la consternation. Pourtant, même si les évolutions que nous appelons de nos vœux ne vont, bien sûr, pas assez vite, ni assez loin, il est aujourd'hui frappant de constater combien nos convictions se répandent dans la société. Ainsi, nos mises en garde contre les dangers de l'immigration et de l'islamisation sont maintenant partagées, voire revendiquées par ceux-là mêmes qui les combattaient avec acharnement, il y a encore quelques mois : les intellectuels de gauche. Ce réveil douloureux de certains intellectuels de gauche doit nous remplir d'espoir et de combativité renouvelée : il démontre, en effet, que la réalité finit toujours par s'imposer ; même aux tenants les plus acharnés de l'utopie, comme en témoignent les deux citations reproduites ci-dessous.

"Je répondrai d'abord sur le point de savoir si le port du voile peut apparaître comme une forme de racisme. Nous sommes entrés dans une ère où l'antiracisme est devenu une idéologie. On reformule tout dans les termes de l'antiracisme. En réalité, ce ne sont pas les jeunes filles, mais le foulard, qui est exclu. L'exclusion des jeunes filles constituerait une forme de racisme, mais l'interdiction du foulard n'est que l'application d'une règle de droit qui vaut pour tous. Quant à l'antiracisme développé jusqu'à son terme, il fait de la tolérance la valeur des valeurs, or la tolérance est le visage souriant du nihilisme. Si la tolérance est la valeur des valeurs, alors tout se vaut ! Ta culture, ma culture et qu'est-ce que tu viens m'embêter ? Et c'est de cela que l'école est en train de périr à petit feu.
Quant à la prétendue injustice que représenterait l'application du calendrier catholique, alors que coexistent précisément toutes sortes de religions, il s'agit du cœur du problème, à savoir la mutation progressive de la France, qui est de moins en moins une nation et de plus en plus une société. La société est une collectivité qui vit au présent, composée de groupes affirmant chacun ses revendications et ses droits. Une société ne compte que des plaignants, une nation, que des citoyens héritiers et dépositaires d'un passé. Ce passé, la France l'ouvre à tous. Mais ce passé est, en effet, partiellement catholique. Et c'est précisément de ce catholicisme que la laïcité s'est séparée trop rigoureusement, de telle sorte que l'on ne comprend rien aux œuvres de culture si l'on ne veut rien savoir de leur substrat catholique. Il est très dangereux d'avoir une vision exclusivement contemporaine de la collectivité dans laquelle nous vivons. Nous ne sommes pas seulement une société, nous devons être aussi une nation."

Alain Finkielkraut

Alain Finkilelkraut est philosophe et écrivain. Autrefois considéré comme nettement à gauche, ses nouvelles prises de position lui ont valu d'être étiquetté "néo-réactionnaire" dans un petit opuscule de délation rédigé à la hâte par un militant socialiste: Le rappel à l'ordre, de Daniel Lindenberg, publié au Editions du Seuil. La citation ci-dessus est extraite d'une intervention prononcée par Alain Finkielkraut au cours d'une table ronde organisée à l'Assemblée nationale sur le thème de la laïcité.

"Tout d'un coup, en haut-lieu, on découvre après tant d'années qu'avec la tolérance on ne fait pas une nation, on installe des communautés. On ne défend pas des valeurs, on se résigne à leur coexistence. Et puis soudain, on se met à découvrir des choses simples que je tient pour évidentes depuis si longrtemps. l'une de ces choses est que le droit du sol, c'est à dire la possibilité d'être français si le hasard nous a fait naître quelque part en France, ne communique évidemment pas automatiquement le désir de partager les souvenirs, les projets, les épreuves et les éspérances, la civilisation et les luttes du pays dans lequel on est né, dans lequel on a eu la chance de naître (...) La multiplicité des mosquées ne change pas seulement le paysage, mais le passé d'un pays."

Jean Daniel Jean Daniel est le rédacteur en chef du Nouvel Observateur, hebdomadaire de prédilection de la bourgeoisie socialiste et mondialiste. La citation ci-dessus, en complète contradiction avec les prises de position habituelles de son journal, est extraite d'une tribune qu'il a publié dans Le Monde du 9 juillet 2003. Elle témoigne d'un véritable revirement intellectuel, dans la mesure où affirmer des réticences quand au droit du sol suffisait, il y a peu encore, à être qualifié de fasciste.

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