LA CROISADE ISLAMISTE

Mieux comprendre l’islamisme...pour mieux le combattre

Qui sont les islamistes ? Que veulent-ils ? De quels moyens disposent-ils ? Comment les affronter ? Dans son dernier ouvrage, remarquablement documenté, le sociologue Jean-Paul Gourévitch dresse un état des lieux de la montée de l’islamisme en Europe et en France. Il analyse également la capacité de résistance des sociétés face à cette menace... En guise d’entrée en matière, voici quelques « bonnes feuilles » consacrées à une présentation générale du phénomène islamique en Europe de l’ouest.
Le nombre de musulmans dans l'Union européenne que Xavier Raufer [criminologue, ndlr] évaluait entre 15 et 17 millions en 2007 a largement progressé depuis, du fait de l'immigration et du différentiel de natalité, et se situerait entre 20 et 25 millions, concentrés principalement en France, en Allemagne, au Royaume-Uni et en Espagne.

À l'exception du Royaume-Uni où les originaires du sous-continent indien et de l'Afrique anglophone sont nombreux, la majorité provient de l'immigration d'Afrique du nord et, à un moindre degré, d'Afrique subsaharienne francophone.


De ce fait, l'Europe abrite aujourd'hui 60 millions de personnes étrangères, dont 7 à 8 millions en situation irrégulière, et apparaît comme la tête de pont de l'Occident, donc la cible privilégiée du terrorisme. Les opinions publiques européennes sont naturellement plus sensibles aux attentats spectaculaires de Londres et de Madrid, voire aux flambées terroristes de Tchétchénie, qu'à ce qui se passe en Extrême-Orient ou au fin fond de l'Afrique. En même temps, les services de renseignements, aujourd'hui coordonnés, tentent d'exploiter les informations concernant les filières et d'opérer des arrestations préventives. Un Situation Center [cellule de renseignement européenne, ndlr] a été créé au lendemain des attentats de Madrid pour analyser la menace terroriste. Toutefois, la situation est loin d'être stabilisée. (...) Selon l’Atlas de l’islam radical, actualisé par les informations dont nous disposons, les principaux pays d'Europe sont touchés.

L'ALLEMAGNE
L’Allemagne compte plusieurs millions de musulmans. Les islamistes turcs de l'organisation Millî Gorüs y sont bien implantés. On répertorierait plusieurs dizaines de milliers de sympathisants qui pourraient être enrôlés par les quelques centaines de cadres vivant en Allemagne et qui ont fait leurs armes sur les terrains de guerre. En 2002, un rapport signalait la présence de 30.000 membres d'organisations extrémistes, dont 200 jihadistes formés dans les camps afghans. Une partie des cellules de logistique et de financement seraient actives à Francfort, Hambourg, Munich. Les services de sécurité ont déjoué des attentats à Coblence, Dortmund, Berlin et Francfort, arrêté de nombreux islamistes liés aux réseaux GSPC, Abu Musab al-Zarkawi, Ansar al-Islam et Tawhid wal Jihad et fermé plusieurs centres culturels proches des islamistes.

LA BELGIQUE
La Belgique abrite plus de 500.000 musulmans, principalement marocains, et sert de carrefour entre la France et les Pays-Bas pour les trafics de drogues et de cigarettes. La police belge a neutralisé le gang de Roubaix et le Groupe islamique combattant marocain aux termes de combats meurtriers avec les terroristes. C'est en Belgique qu'aurait été échafaudé l'assassinat du commandant Massoud en 2001, commandité par Abu Jaffar en liaison avec les groupes dits des « Bruxellois » et des « Anversois ». En 2008, la police belge a arrêté quatorze islamistes prêts à participer à un attentat suicide, dont Malikael- Aroud, la femme de l'assassin du commandant Massoud. Parallèlement, onze islamistes qui projetaient des attentats au Maroc et en Belgique ont été arrêtés par la police marocaine.

L'ITALIE
L’Italie comprend entre 700.000 et 2 millions de musulmans, pour la plupart d'immigration très récente, principalement des Marocains, mais aussi des Égyptiens, des Albanais, des Turcs, des Sénégalais, des Tunisiens, des Libyens et environ 10.000 convertis. La surveillance policière a été renforcée dans le Nord où seraient concentrés quelques centaines de jihadistes, autour des mosquées de Via Quaranta et de Viale Jenner à Milan, et qui s'occupent principalement du trafic des faux papiers et de l'acheminement des volontaires vers les lieux de combat.
Ce pays a été désigné comme cible prioritaire par les Brigades Abou hafs Al- Masri pour son engagement en Irak. Plusieurs italiens ont été enlevés en Afrique par des islamistes et libérés contre rançon. Jusqu'à ces dernières années, l'action vigilante de la police et le rapprochement entre la Libye et l'Italie ont évité à ce pays de connaître un attentat terroriste. Une situation susceptible de se transformer avec les événements de Tunisie, de Libye et d'Egypte, qui fragilisent la frontière du littoral sud de la Méditerranée à quelques dizaines de kilomètres de l'île de Lampédouse, et non loin de Malte et de Chypre par où passe une partie de l'immigration irrégulière en provenance du sud.

POINT FIXE SUR L’ISLAMISME EN EUROPE
Il n'y aura pas, à court terme, de construction d'un Etat islamique national ou multinational en Europe. Les musulmans radicaux, qui le savent, privilégient donc la prédication religieuse dirigée par des cadres venus de l'étranger sur l'action politique et comptent rallier à leur cause une partie de la jeunesse musulmane victime de la précarité et à la recherche d'une identité qui lui redonne sa fierté. Obligés de composer avec les politiques publiques des pays d'accueil qu'ils ont choisis, les islamistes s'adressent en priorité à de jeunes musulmans qui ont rejeté les pratiques traditionnelles de leurs parents sans se sentir chez eux dans des pays qui les accueillent (...). Ils les incitent à se réislamiser, mais aussi à réussir, à devenir dans leur domaine des coachs ou des caïds (...).
Leur souci est aussi de se solidariser avec des forces de progrès qui partagent les mêmes valeurs (antiaméricanisme, antimondialisme, droit des minorités) pour s'en faire des alliés en vue de l'islamisation progressive de la société civile. Au nom d'une liberté d'expression, de culte, d'association, de port de vêtement qui n'a pas de contrepartie dans les pays dont ils sont issus, ils utilisent les faiblesses spirituelles, identitaires, démographiques, économiques des pays dont ils sont résidents pour affirmer leur légitimité, faire état de leur audience et persuader les gouvernements en place que rien ne peut être fait sans eux ni contre eux. Extraits de La Croisade islamiste, pour en finir avec les idées reçues, éditions Pascal Galodé, 277 p., 21,90 euros

 

 

 

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