LA FRANCE VENDUE A LA DÉCOUPE

Les beaux esprits qui nous gouvernent semblent avoir compris que le véritable moteur de la croissance aujourd’hui n’est pas la consommation, puisque celle-ci sert principalement à acheter des produits fabriqués à l’étranger, mais bien la production, seule source d’emplois utiles à la croissance. Ces mêmes partisans du développement productif chantent donc aujourd’hui à l’envi qu’il faut soutenir la production française.

L’idée est excellente, à un détail près : qui détient les entreprises françaises ?

Nous ne sommes plus à l’époque des grandes fabriques ou des ateliers de Paris ou de province qui employaient des Français de souche pour produire des biens ou des services conçus en France. Le mondialisme est passé par là et le cosmopolitisme économique a succédé aux « 200 familles » (pour reprendre l’expression du parti communiste section France).

Quelques chiffres récents illustrent la question : 352 entreprises, grandes ou moyennes, ont fait en 2011 l’objet d’un rachat par des étrangers. En 2012, 327 ont subi le même sort, comme l’indique M. Jean-Etienne Juthier.

Nos amis et fidèles alliés américains sont les premiers acheteurs dans cette foire à la brocante de notre capacité de création de valeur : en 2012, ils ont fait main basse sur 77 entreprises ; avant le Royaume-Uni, l’Allemagne et la Belgique. Viennent ensuite « s’approvisionner » le Japon, le Qatar, la Chine et bien d’autres.

Etranglées par les charges, muselées dans les cages du droit du travail et de ses 35 heures, assommées par la concurrence des producteurs à faible coût de main-d’œuvre, des entreprises françaises pourtant florissantes passent ainsi sous l’autorité d’étrangers, comme les brasseries Kronenbourg, vendues à des Ecossais en 2008, puis rachetées par un investisseur néerlandais la même année, ou Yoplait, détenue depuis 2011 par l’américain Häagen-Dazs, ou encore Amora-Maille, rachetée par Unilever.

Les « jeunes pousses » (en anglais start-up) ne sont pas non plus à l’abri : le site fr.finance.yahoo.com cite : « le cas du site aufeminin.com, fondé en 1999 par deux polytechniciens, qui s’est imposé comme le leader de l’audience féminine sur Internet, qui aurait bien pu trouver un acquéreur naturel en France avec Lagardère. Mais les Allemands ont été plus rapides. Quant au fameux site de rencontres Meetic, introduit en Bourse, il est désormais aux mains de son ancien concurrent majeur l’américain match.com. »

Certains pourraient penser qu’il importe peu que le propriétaire soit étranger si l’entreprise continue son activité en France : cette vision est quelque peu superficielle, car la politique du nouveau dirigeant sera forcément différente ; les 1.600 salariés de Mercachrome, basée dans le Cher, en savent quelque chose, puisque leur entreprise a failli tomber sous la coupe d’un fonds américain qui l’aurait dépecée pour la revendre en morceaux.

Au delà de cette attitude de carnassier, toujours possible, c’est souvent l’existence même de l’activité qui est remise en cause.

Politiquement, c’est notre capacité de créer et de commercer qui nous est confisquée, c’est notre identité économique qui disparaît : notre fleuron, l’hôtellerie de luxe, appartient maintenant, pour ses plus beaux « palaces », au Qatar, à Hong-Kong, au sultanat de Brunéi ou à l’Arabie saoudite !

A propos d’identité et dans le même ordre d’idées, n’oublions pas qui paye l’équipe de balle au pied de l’équipe Paris-Saint-Germain, dont le maillot proclame, en anglais : « Fly Emirates » (volez sur les lignes des Émirats) !...

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